Bienvenue !

Mis en avant

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Bonjour et bienvenue sur le blog du Groupe Araignées Bruxellois, surnommé « Spidermanneke »

Ce blog a pour but de sensibiliser le public au monde fabuleux des araignées, ces petites bêtes à huit pattes trop souvent mal aimées.

N’hésitez pas à me contacter :

bsegers@naturalsciences.be

gt.araignees@gmail.com

 

Qu’est devenu le GT-araignées ?


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Vous l’aurez peut-être remarqué, ce site n’a plus reçu de publications depuis 4 ans déjà… En cause, un virage professionnel qui m’a d’abord fait passer des Araignées aux Echinodermes, un second virage plus brutal encore et très récent qui me plonge dorénavant dans le monde des Mollusques en général, et des Gastéropodes terrestres en particulier. Autant vous dire que mon cerveau a dû subir quelques adaptations par rapport aux terminologies, vocabulaires et autres définitions… Mais rassurez-vous, le cerveau s’adapte presqu’à tout et je garde un œil discret sur les araignées, me disant qu’un jour peut-être je serai amenée à m’y replonger.

Quatre années sans publications, et je continue pourtant à recevoir de temps en temps des questions, des demandes d’identifications, des avis… cela fait toujours plaisir et cela permet de me maintenir au courant.

Je ne publie plus d’article car je n’ai franchement plus beaucoup de temps à y consacrer. Parce que j’ai aussi l’impression d’avoir fait un peu le tour de la question. Parce qu’il existe de plus en plus de très bons livres sur le sujet. Parce que les blogs ont de moins en moins la cote.

Je reste néanmoins à disposition pour échanger des avis, répondre aux questions, aider aux éventuelles demandes d’identifications et cela reste un plaisir de le faire.

Vous pouvez donc continuer à me contacter via les adresses suivantes :-)

Gt.araignees@gmail.com ou bsegers@naturalsciences.be

Au plaisir de vous lire,

Brigitte Segers



Quelles sont donc ces araignées ?

Dans le poste précédent, je vous parlais de l’importance d’avoir une photo de bonne qualité pour pouvoir essayer d’identifier une araignée. Récemment, j’ai reçu ces deux magnifiques clichés : araignées (8-9mm) trouvées sous l’écorce d’un tilleul abattu par la tempête (Province de Namur) novembre 2016.

Comment faut-il procéder ?

N’étant pas la super spécialiste en identification, j’essaye toujours de trouver en premier lieu la famille à laquelle appartient l’araignée. C’est une question de survie, car si je dois consulter page par page toutes les photos de mes guides, j’y passerais la journée, et peut-être la nuit… C’est la même chose lorsque l’on fait de la botanique : on apprend d’abord à reconnaître les caractéristiques principales des différentes familles.

Photo 1

Tetrix denticulata (Agelenidae)

© Guy Isaac

Dans notre premier exemple, il y a un caractère vraiment évident sur cette photo : deux très longues filières qui dépassent de l’abdomen. Bingo, c’est la principale caractéristique propre à la famille des Agelenidae : « Les Agelenidae se distinguent par leur filières postérieures nettement plus longues que les antérieures ».

Pas besoin d’aller plus loin, on prend ensuite un bon guide d’identification et vu l’habitus caractéristique de cette araignée, il ne faudra pas plus de 2 minutes pour trouver son nom : Textrix denticulata (Olivier, 1789).

Je vérifie toujours plusieurs sources différentes avant de lâcher un nom sans avoir observé les parties génitales au binoculaire : différents guides papier, quelques sites Internet de référence. Et pour finir, je vérifie également si cette espèce est présente dans le pays où elle a été photographiée et s’il y a de nombreuses espèces ressemblantes au sein du même genre, dans quel cas j’aurais alors répondu Textrix sp.

En Belgique, seulement deux Textrix : Textrix denticulata et Textrix caudata. Textrix denticulata possède des filières beaucoup plus longues que T. caudata et le dessin de l’abdomen est caractéristique.

Et pour conforter mon verdict, le guide Bellman me dit  « se distingue des Tégénaires (même famille) non seulement par l’abdomen à taches et chevrons noirs, mais aussi par les filières postérieures remarquablement longues. »

Ecologie : « Falaises et murs ensoleillés, en forêts sur les troncs. Elle tisse une toile tubulaire qui s’élargit en nappe, par exemple dans les fissures rocheuses ou entre les tapis de mousse. Le mâle adulte ne construit plus de toile et est observable souvent sur les troncs d’arbres ou au sol. Localement dans les maisons. Répandu mais peu commun« .

Photo 2

Neriene montana (Linyphiidae)

© Guy Isaac

La seconde araignée est un peu plus compliquée à identifier. En voyant la photographie, je sais que je dois aller du côté des Theridiidae ou des Linyphiidae. Pourquoi ? A cause de la disposition des yeux, de la forme du corps, des pattes… et peut-être d’un petit peu d’intuition féminine.

Par contre, il y a beaucoup de Theridiidae et de Linyphiidae et si celle-ci n’avait pas un dessin aussi caractéristique sur son abdomen, je n’aurais jamais pu l’identifier. Une fois de plus, les spécialistes y arrivent, moi pas.

En parcourant mon guide Bellmann (Guide photos d’araignées), il n’y a que 22 pages de Theridiidae et un peu plus chez les Linyphiidae et je tombe assez vite sur Neriene montana (Clerck, 1757). Après quelques vérifications avec d’autres photos de guides papier et sites internet, je vois que l’espèce colle aussi bien aux photos qu’à sa distribution et son écologie : « Abdomen à dessin en feuille… Surtout dans les forêts et les fourrés, mais régulier aussi dans les jardins. Assez commun et répandu dans toute l’Europe. Cette araignée tisse sa toile sur des branches feuillues, dans les fissures des murs, sous les écorces décollées ou tout autre endroit riche en anfractuosités« . Les différentes espèces de Neriene en Belgique sont presque toutes identifiables sur base du dessin de leur abdomen… L’identification peut donc être confirmée.

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Je le dis et je le répète souvent, l’identification des araignées sur base de photo est un exercice périlleux, et qui n’est pas fiable à 100%. Je me prête à ce jeu pour tenter de répondre aux gens qui me posent la question et pour leur rendre service.

J’ai également remarqué que les gens prennent la peine de prendre une photo lorsqu’ils sont intrigués ou attirés par l’aspect de l’araignée, car celle-ci est soit colorée, soit arbore un dessin original ou marquant. Et ce sont ces araignées qui sont « plus facilement identifiables » sur base de photo.

Comme quoi, la nature est bien faite !

 

Les araignées, c’est f(l)ou

Dans le cadre des questions posées par mail, je reçois de très nombreuses photos qui me donnent parfois beaucoup de difficultés. Je ne suis pas là pour juger du talent artistique de chacun et je sais que les araignées peuvent être très difficiles à photographier, mais il me faut un minimum de netteté pour répondre à ces questions.
Il est parfois plus facile de prendre une photo de l’animal sur sa toile (quand elle existe) quand l’araignée ne bouge pas. Il faut alors faire attention au vent, aux reflets du flash, et prendre une photo de préférence de la face dorsale de l’animal. Si les deux (faces ventrales et dorsales, c’est encore mieux).
Mettre l’araignée dans un pot est une bonne idée. Il suffit alors d’attendre qu’elle arrête de bouger mais encore faut-il que votre appareil fasse la mise au point sur l’araignée et non sur le contenant. N’oubliez pas ensuite de remettre l’araignée où vous l’avez trouvée.
Si vous ne disposez pas d’un bon appareil, ou que l’image est vraiment très floue, je ne sais rien faire de la photo. Une description très précise peu alors parfois aider : comportement, lieu d’observation, moment de l’observation, dessin caractéristique…
N’oubions pas non plus que pour de nombreuses espèces, seule l’observation des parties génitales de l’araignée permettra de confirmer l’identification, et ce avec ou sans photos de très grande qualité.

 

Voici donc quatre exemples difficiles – et j’insiste, loin de moi l’idée de me moquer des auteurs de ces photos.
Brigitte
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Question 1:
« pardon de vous déranger, est ce que vous savez quelle est cette araignée s’il vous plait ? je l’ai trouvée chez moi ce matin dans la cuisine et impossible de trouver ce que c’est et si c’est dangereux… « 
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Réponse 1:

« Cela me semble être une Epeire diadème de petite taille, et donc juvénile et surtout sans danger. Si vous habiter en Belgique, il n’y a aucune araignée dangereuse. »
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Question 2:
« Je me permets de vous contacter pour avoir des infos sur cette araignée que j’ai trouvée ce matin a la porte arrière de mon domicile. »
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Réponse 2 : « Il s’agit vraisemblablement d’une Epeire, mais laquelle ? Les photos sont vraiment trop floues. Si elle a une sorte de croix sur l’abdomen, c’est l’Epeire diadème. Mais sans un cliché plus net, je ne peux rien faire de plus. »
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Question 3
« Je me permets de vous écrire car j ai beau chercher sur internet le nom d une araignée trouvée hier dans notre maison en plein bxl, au 4étage, ds la chambre de mon fils, sous les toits.J aimerais vraiment savoir d ou a pu sortir une telle bête alors que des araignées j en ai vu déjà pas mal.Mon fils a pris une photo que je vous envois mais la qualité est médiocre. Si il s agit comme je l ai lu d un mâle en recherche de femelle,j espère qu il ne l’a trouvera pas chez moi…. »
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Réponse 3 : »Bonjour. Je ne vais pas pouvoir vous aider avec une photo de ce genre. Le jaune peut-être un jeu de lumière à cause du flash. C’est peut-être une Tégénaire qui se promène. Il n’y a aucune araignée dangereuse en Belgique. »
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Question 4 :
« Depuis 3 ans dans mon jardin et aux alentours de septembre/octobre, la même araignée fait son apparition. Cette année, sa « petite soeur » est aussi de la partie dans une toile pas très loin de la première.
J’ai cherché en vain qu’elle pouvait bien être son nom sur internet et sur votre site mais sans succès.
Je vous joints des photos de la bête en espérant que vous puissiez me renseigner sur celle-ci malgré le peu d’informations que j’ai. Malheureusement je n’ai que sa face ventrale, et une photo de nuit qui montre bien sa toile un peu abîmée..
Petites précisions qui pourront peut être aider : j’habite en région méditerranéenne dans le sud de la France, on la voit en général de septembre à mars, et elle sort de sa cachette pour rejoindre le centre de sa toile qu’en fin d’après midi et toute la nuit. Sur son dos elle a une tache plus claire, presque blanche.
En espérant que vous puissiez m’aider à en savoir plus sur cet habitant de mon jardin, merci d’avance! »
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Réponse 4 : « Bonjour.Je suis sincèrement désolée mais sans photo de sa face dorsale, je ne pourrai pas vous aider.

Il nous faudrait au moins le dessin précis qui apparaît sur son dos. Si vous pouviez refaire une photo, cela me permettrait peut-être de trouver son petit nom.Seule certitude, il s’agit d’une araignée de la famille des Araneidae. »

Conférence : Sociétés des araignées et insectes

Société des araignées et insectes. Des origines de la vie sociale à la nutrition et l’hygiène collective

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Trois aspects essentiels du phénomène social seront abordés dans cette session spéciale : son émergence, la nutrition des individus et les stratégies prophyllactiques.

Outre les insectes sociaux, d’autres espèces ont développé des formes sociales élaborées. La coexistence d’espèces solitaires et sociales et le rôle des facteurs écologiques dans l’expression des comportements sociaux font des araignées un modèle de choix pour élucider la transition de la vie solitaire à la vie sociale (R. Jeanson).

Pour tout organisme solitaire ou social, la nutrition est essentielle. Une nouvelle approche intégrative de la nutrition, « The Geometrical Framework », permet de mieux comprendre l’effet des différents nutriments et de leurs interactions sur des phénomènes aussi différents que les activités collectives des insectes ravageurs, l’organisation des sociétés d’insectes ou l’obésité chez l’homme (A. Dussutour).

Dans les sociétés peuvent s’accumuler nombre de déchets, sources potentielles de contamination et, de plus, la transmission de pathogènes est favorisée par les interactions entre individus. À l’appui de leur immunité individuelle, les insectes sociaux ont développé divers comportements — l’immunité sociale — qui assurent prophylaxie et hygiène de la société (C. Detrain).

Coordinateur et responsable académique :
Jean-Louis Deneubourg (Académie royale de Belgique)

PROGRAMME

Mardi 20 septembre 2016 de 17 à 19 h
Transitions sociales : des araignées solitaires aux araignées sociales
Raphaël Jeanson (Centre de Recherches sur la Cognition Animale – France)

Mardi 04 octobre 2016 de 17h à 19 h
Nutrition individuelle et collective
Audrey Dussutour (CNRS, Université de Toulouse – France)

Mardi 11 octobre 2016 de 17 à 19 h
Vie collective et immunité sociale : prophylaxie et hygiène au sein des sociétés d’insectes
Claire Detrain (Université libre de Bruxelles)

Accès libre. Inscription souhaitée en cliquant sur les liens ci-dessus.

LIEU
Palais provincial de Namur
Place Saint-Aubain, 2 – 5000 Namur

CONTACT
Palais provincial de Namur
Place Saint-Aubain, 2 – 5000 Namur
collegebelgiquenamur@academieroyale.be
www.collegebelgique.be

FAQ: les toiles d’araignées sont elles venimeuses ?

Voici une question posée par mail :

Salut !

Je vérifies toujours les bananes (avec des gants) qu’on ramène à la maison pour voir s’il n’y aurait pas de cocons, de toiles ou des araignées. 

Ce soir, on a acheté des bananes du Costa Rica à l’épicerie, et j’ai vu qu’une des bananes avec un ‘cercle’ de soie. Pas de cocons, mais seulement un cercle comme s’il y avait un cocon auparavant et qu’il avait été enlevé. Rapidement, le cercle semblait être une crotte d’oiseau, mais c’était de la soie… 

J’ai nettoyé la partie de la banane en question avec de l’eau savonneuse. Par contre, j’ai déjà entendu que les toiles d’araignées, aux venins très toxiques (comme Veuve noire, Phoneutria nigriventer, …), étaient toxiques et pouvaient être dangereuses. Est-ce vrai ? Si oui, est-ce que l’eau savonneuse suffit ou je dois recourir à d’autres méthodes de nettoyage?

Si les toiles/soies ne sont pas toxiques, je n’ai donc pas besoin de recourir à un nettoyage?

C’est très important pour moi de savoir, ça m’inquiète énormément… en espérons que vous pourriez me répondre le plus vite que possible !

Merci en avance,

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La question m’a semblée tout d’abord étrange, mais je me suis rendue compte que ceci était l’une des nombreuses fausses croyances attribuées aux araignées.

La toile d’araignée ne contient pas de venin et le venin d’araignée n’est pas déposé sur la toile :

  • Le venin des araignées est contenu dans deux glandes situées au niveau du céphalothorax et reliées aux deux chélicères par deux petits canaux. Pour rappel, les Uloboridae ne possèdent pas de venin.
  • Sur certaines toiles, on peut observer de grosses gouttelettes collantes. Ce ne sont pas des gouttes à venin mais bien des amas de soie collante. Ces gouttes vont uniquement engluer l’insecte pris au piège, sans l’empoisonner.

Un petit cocon de soie sur une banane ne veut pas dire qu’il s’agit d’un cocon provenant d’une araignée, qui plus est mortelle. J’en trouve souvent sur les raisins que j’achète au marché bio :

  • Vu les traitements infligés aux bananes non bio, on a plus de risque de mourir d’un cancer en en mangeant que d’être face à une araignée mortelle.
  • Il y a de nombreux insectes qui produisent de la soie à certains stades de leur vie, un cocon ne signifie donc pas nécessairement araignée.
  • Vous ne trouverez jamais de « Veuve noire » dans des bananes, ce n’est pas son biotope.
  • Les araignées dites des bananes – Phoneutria nigriventer (Keyserling 1891) – qui sont effectivement dangereuses pour l’homme, sont tellement grandes qu’on les verrait assez rapidement – ce qui est je pense rarissime, sauf si on croit toutes les inepties racontées dans la presse.
En conclusion, les toiles ne sont absolument pas toxiques – au contraire, on les utilisait même il y a très longtemps pour recouvrir les plaies à cause de leurs propriétés fongicide, anti-bactérienne, voire hémostatique.
extrait du Nouveau Dictionnaire de l’Académie françoise dedié au Roy (2e édition), Paris, 1718.
« Araignée, Se dit aussi, De la toile que font les araignées. Prenez de l’araignée pour mettre sur vostre coupure. Oster les araignées de votre plancher. »
Brigitte Segers

 

Spidermanneke n’est pas tout à fait mort

Ce blog n’a plus été actualisé depuis plus d’un an… manque de temps, manque d’énergie, manque d’idées et problèmes rencontrés avec la nouvelle mouture wordpress…

Mais cela ne signifie pas que Spidermanneke est mort. Pour preuve, les nombreux messages envoyés régulièrement en mode privé et pour lesquels j’essaye toujours d’apporter une réponse. J’ai donc décidé de les mettre en ligne pour partager ces nombreuses questions / réponses avec vous (les auteurs resteront anonymes).

A suivre donc, si vous êtes encore là.

 

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Les fil(le)s de l’air

Les araignées se distinguent des insectes par trois critères anatomiques très précis : la présence de quatre paires de pattes, un corps composé de seulement deux parties et l’absence d’antennes. Il existe de nombreuses autres différences telles que la structure des yeux, l’appareil buccal, le mode de digestion ou la présence de filières, … mais aussi et surtout l’absence totale d’ailes. Pourtant cet article va vous expliquer comment les araignées arrivent à voler.

La plupart des animaux ont plusieurs obligations à accomplir durant leur vie : naître, se nourrir et se reproduire. Les araignées n’échappent pas à cette règle et doivent user de toutes les stratégies pour atteindre l’objectif ultime qu’est la perpétuation de l’espèce.

L’herbe est toujours plus verte chez le voisin :

Les araignées pondent en général un nombre très variable d’œufs, celui-ci pouvant aller de un seul œuf (dans de très rares cas) à plusieurs milliers, avec une moyenne se situant quelque part entre les deux… autant dire que lorsque les toutes jeunes araignées émergent en même temps, elles ont très vite besoin de se disperser pour trouver à la fois de la nourriture et échapper aux chélicères de la « chambrée ».

Vu la taille relativement petite des araignées (à notre échelle du moins) celles-ci ont développé une stratégie assez extraordinaire pour se disperser et coloniser d’autres milieux puisqu’au lieu de se déplacer uniquement au sol, elles peuvent aussi littéralement changer d’air.

Pour ce faire, l’araignée utilise la technique de dispersion aérienne appelée ballooning, en référence aux ballons gonflés d’hélium qui s’envolent dans le ciel.

Baptême de l’air :

Le ballooning se déroule en plusieurs étapes :

  • l’araignée monte sur un support pour s’éloigner de la surface du sol et pouvoir ressentir les courants d’air chauds ;
  • lorsqu’elle a trouvé son point d’envol, l’araignée prend une position dite « tiptoe » traduite par sur la pointe des pattes çad en tendant ses pattes au maximum pour séparer son corps le plus que possible du support sur lequel elle se trouve ;
  • l’abdomen relevé et tendu vers le haut, l’araignée produit alors un fil de soie de quelques dizaines de centimètres de long et qui reste attaché à ses filières.
  • le moindre courant d’air chaud lui suffira alors pour lâcher le support et s’envoler dans les airs.

Dictyna uncinata : Banque d'images ARABEL / ©Pierre Oger

Dictyna uncinata : Banque d’images ARABEL / ©Pierre Oger

Envolée sauvage :

La dispersion aérienne des araignées doit être vue comme une dispersion aléatoire qui n’a rien à voir avec les phénomènes migratoires des oiseaux incluant à la fois une trajectoire et une destination bien précises. Une fois dans les airs, les araignées ne contrôlent pas leur déplacement ce qui explique que celui-ci peut se terminer à quelques centimètres à peine de l’endroit de décollage ou aboutir à plusieurs centaines de kilomètres. Toutes les araignées n’arrivent donc pas à bon port et les pertes lors de ce genre de déplacement semblent compensées par le nombre élevé d’individus. En 1830, lors de son voyage à bord du bateau HMS Beagle, Charles Darwin note dans son carnet que le ponton est envahi par des araignées tombées du ciel alors que le bateau se trouve à plus de 100 km des côtes. Dans la littérature, on retrouve des distances parcourues allant jusqu’à, tenez-vous bien, 5000 km.

Les femmes et les enfants d’abord :

Ce sont majoritairement les araignées juvéniles qui utilisent ce mode de transport, mais des adultes pratiquent également le ballooning, que ce soit pour la recherche d’un partenaire ou de la nourriture. Le ballooning varie bien évidemment d’une espèce à l’autre mais dépend également des conditions climatiques et de la localisation géographique.

Dans une étude suisse (1998, G. Blandenier and P.-A. Fürst) basée sur l’analyse de 11 années de récoltes d’araignées capturées dans les airs par un mécanisme d’aspiration – soit 15.398 individus répartis en 103 espèces et 16 familles, les minuscules araignées de la famille des Linyphiidae arrivent en tête du classement, avec presqu’autant de juvéniles que d’adultes dont une proportion plus importante de femelles.

On apprend également dans cette étude que deux tiers du total des araignées récoltées sont des juvéniles pour un tiers d’adultes.

Pour des raisons évidentes de taille et de poids, on ne verra donc jamais une grosse Mygale adulte s’envoler. Par contre, et cela se passe chez nous en Belgique, les juvéniles mygalomorphes d’Atypus affinis Eichwald, 1830 et Atypus pisceus (Sulzer, 1776), nos deux petites mygales belges, pratiquent ce mode de dispersion. C’est d’ailleurs le meilleur moment pour les observer puisque une fois devenues adultes, ces Atypidae passeront le reste de leur vie dans une chaussette de soie enfuie à plusieurs centimètres dans le sol.

Fils de la vierge :

Ces dispersions aériennes laissent des traces observables sur le terrain, lors de chaudes journées d’automne ou d’été, et si la brume s’en mêle, les nombreux fils abandonnés par les voyageuses peuvent sembler recouvrir entièrement la végétation. On les nomme alors « fils de la vierge » ou encore « cheveux d’anges », de bien jolies expressions qui font un peu oublier la mauvaise réputation qu’ont les araignées.

Banque d'images ARABEL / ©Diane Appels

Fils de la vierge : Banque d’images ARABEL / ©Diane Appels

Brigitte Segers

Référence : BLANDENIER, G. & FÜRST, P.-A. 1998. Ballooning spiders caught by a suction trap in an agricultural landscape. Switzerland. In P. A. Selden (ed.), Proceedings of the 17th European Colloquium of Arachnology, Edinburgh 1997: 177–186. British Arachnological Society, Burnham Beeches, Bucks.